chroniques de gares (jour trois)

09/10/2016, 08 :23, gare de Grenoble, hall de la gare puis voie C, puis train n°17613 à destination de Lyon Part-Dieu

 

 

J’ai cru qu’il allait partir, quitter la gare, et que je ne pourrais pas écrire sur lui. Et puis non. Heureusement pour moi, il ne part pas. Mieux que cela, il reste.

 

Il s’arrête à la machine à café, à côté de moi. Il va ensuite acheter quelque chose à La Brioche Dorée, beaucoup de personnes attendent et il fait comme eux : il attend. Il rejoint ensuite le couloir qui mène aux quais un beignet à la main (chocolat, pomme, framboise ? j’imagine du chocolat). Je suis cet homme dont le visage me rappelle celui de Christophe Maé. Je le suis, et je crois que nous allons vers le même train, et j’en suis heureuse. Deux trains sont à quai et je le regarde monter dans le mauvais, dans l’autre que le mien. Je suis déçue. Et puis il ressort, il s’était trompé, évidemment, nous voyageront ensemble. Je m’installe près de lui, de l’autre côté du couloir. Il s’est assis dans le sens de circulation du train. Je le regarde. Il est beau. Il a probablement une quarantaine d’années, il est habillé sobrement, en noir, juste ce qu’il faut d’élégance. Je suis heureuse, soudain, d’être assise à ses côtés et d’écrire sur lui. Je prends mon temps, je sais que nous avons une heure trente pour nous. C’est un peu comme un rendez-vous auquel il ne sait pas qu’il participe, et ça me trouble. Il termine son petit-déjeuner et cherche du regard une poubelle, la seule envisageable est celle près de moi. Il se penche en me disant « Je suis désolé, pardon » avec un petit rire de gêne. Le sourire lui va bien. Il sort son ordinateur, son agenda et une pochette en carton bleue. Il pose une paire de lunettes sur son nez, c’est étrange comme un rien peut changer le visage des gens. Il regarde un plan des transports en commun de Lyon et griffonne quelque chose, je ne sais pas quoi. Je me demande d’où il vient. Je me demande quelle est son histoire. J’avais imaginé jusqu’ici qu’il se rendait à un rendez-vous professionnel, mais je réalise que nous sommes dimanche alors non, sans doute pas. Mais alors, quoi ? Il se tourne vers moi et m’offre un grand sourire, j’ai mon appareil photos entre les mains et il ne sait pas que je regarde les clichés de lui. Je m’endors et lorsque je me réveillerai il sera déjà bientôt l’heure de nous quitter. Pendant mon sommeil, il a posé ma valise qui roulait sur les sièges en face de moi, cet homme attentionné. 

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